Ar-Men Raid 2013 : du phare d’Ar-Men au feu de Tévennec (15km)

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Un raid pour la protection des phares en mer

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Ce défi aquatique qui se déroule à l’ouest de la Bretagne à pour objectif de soutenir la « Société Nationale pour le Patrimoine des Phares et Balises » (SNPB) qui milite pour la prise de conscience de la nécessaire sauvegarde de ce patrimoine menacé. Le vendredi 2 août 2013, avec un autre nageur, Alain Grégis qui a traversé le lac Léman (77km en relais),  nous avons comme objectif de nous mettre à l’eau devant le phare d’Ar-Men pour rallier à la nage la plage des Trépassés près de la pointe du Raz. Nous devons passer au large du phare de Sein, du feu de Tévennec et du phare de la Vieille dans le but de sensibiliser et attirer l’attention des pouvoirs publics sur le mauvais état des phares en mer. Une fois le raid accompli,  il est prévu de se remettre à l’eau dans le port d’Audierne pour une arrivée à la nage « en public » devant la mairie pour lancer l’ouverture des festivités de la « Route de l’Amitié ».

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Nous avons rendez-vous le matin à 7h00 sur le port de Sainte-Evette (là où on embarque pour l’île de Sein) avec les joyeux kayakistes du Centre nautique de Plouhinec, les 2 bateaux d’assistance, le Président de la Société nationale des phares et balises Marc Pointud et quelques proches venus nous soutenir. Pour cette traversée, Alain sera accompagné par les kayakistes Hugues Termeau et Patrice Le Roux et, sur le bateau de sécurité, par Yvon Lagadec le patron d’Iroise Mer, Marc Pointud le très motivé président de la SNPB, un médecin et la journaliste Brigitte Godefroy.

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De mon côté, je serai accompagné par Jean-Yves Jacq et Julien Martin en kayak et sur le bateau de sécurité le « Chris II » de Pascal et Annie Baudouin, un couple d’Hennebont habitué à l’encadrement d’épreuves nautiques sans oublier leur chien Benji ! Ces naviagateurs participent à la Route de l’Amitié, partenaire de l’événement. Il y aura également à bord 2 journalistes de l’AFP et un journaliste du « Télégramme », Ronan Lavor qui rédigera un « Chrono » de la traversée mais également Sylvianne Grégis, la femme d’Alain, qui optera pour le confort du bateau qui m’a été attribué.

A cette heure si matinale, le temps semble présager d’une belle journée en perspective : 22º3 dans l’air, 18º9 dans l’eau du port. Nous quittons le port avec une petite heure de retard pour nous rendre vers le phare d’Ar-Men. Nous allons naviguer pendant plus d’une heure au milieu d’une mer bien agitée dont les vagues d’environ 1 mètre partent dans tous les sens, suite aux effets combinés des courants et du vent de force 3 qui souffle du sud-ouest.

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Nous longeons toute la chaussée de Sein par le nord. La Chaussée de Sein est le prolongement sur 25km vers l’ouest des formations granitiques de la pointe du Raz. Son point le plus élevé constitue l’île de Sein. Elle a toujours été un véritable enfer pour les marins. A marée basse, affleure un semis de roches, autant d’écueils pour les navires qui doivent y affronter également des courants d’une violence extrême. Pour signaler ce danger aux bateaux, l’érection du phare d’Ar Men, sur un îlot à l’ouest de la chaussée, fut décidée en 1867, mais mettra 14 ans à  se concrétiser en raison des conditions épouvantables. Premier phare à l’ouest de la Bretagne, le phare d’Ar-Men est le plus célèbre, le plus photographié et le plus prestigieux des phares du littoral français. Considéré comme un lieu de travail extrêmement éprouvant par la communauté des gardiens de phare, il a été surnommé par ces derniers « l’Enfer des Enfers ». Avec son automatisation en 1990 prit fin un siècle de périlleuses relèves des gardiens qui s’y succédaient au milieu des tempêtes. Aujourd’hui automatisé, le phare d’Ar-Men est laissé à l’abandon à l’image d’autres feux construits en pleine mer : murs fissurés, blocs de pierre prêts à s’effondrer, murets détruits, tâches de rouille…

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C’est à 9h20 que nous arrivons devant Ar-Men avec un peu de retard sur l’horaire prévu. Nous allons rapidement nous préparer car le bateau est déjà bien secoué. La mer est agitée et les vagues qui heurtent Ar-Men à marée basse passent au dessus de la base du phare. Alain a prévu de nager en combinaison alors que pour moi ce sera comme d’habitude en maillot de bain ! Je me jette vite à l’eau pour ne pas trop rester sur le bateau après avoir pris à peine le temps de m’enduire de crème solaire et de graisse protectrice contre les déperditions de chaleur. L’eau fait 15º9. Mais avant même le départ, très indisposé, je vais me « libérer » de tout mon petit déjeuner. C’est donc le ventre vide que je prends le départ qui sera donné à 9h46 avec pour objectif de rejoindre la côte à la nage pour la noble cause défendue par Marc Pointud qu’est la sauvegarde des phares en mer

Pendant la première heure, nous allons progresser dans une mer souvent hachée et avec des vagues qui arrivent de toutes parts. Ma nage est complètement désorganisée et il est difficile de respirer sans avaler de l’eau. La température de l’eau ne cesse de changer entre 15,9° et 16,9°C. Malgré ces conditions fort désagréables, il semble que j’arrive à tenir la feuille de route que je me suis fixée. Au bout de 45′, conformément à mon plan de marche, j’effectue mon premier ravitaillement. Comme les prochains ravitos, il va durer quelques secondes, sans prendre appui sur le kayak. Au menu, de l’eau mentholée et boisson protéinée chocolatée. Le temps de voir le paysage et il semblerait qu’en moins d’une heure j’ai déjà parcouru les 1/3 du parcours entre le phare d’Ar-Men et l’île de Sein. Cela semble de bonne augure. Je distance Alain et file à un rythme assez soutenu bien encadré par mes kayakistes et mon bateau-sécu. 

Après 2h30 de nage, je distingue avec plaisir le grand phare de l’île de Sein. Ce phare a été  construit entre 1950 et 1951 et succède à un premier phare construit sur l’île en 1839 et détruit en 1944 par les Allemands lors de la seconde guerre mondiale. Cela veut dire que je suis à environ à 5 km du feu de Tévennec, et, si tout va bien, je devrais passer devant en une heure si les courants de marée font leur travail ! Malheureusement, il n’en sera pas ainsi… Lors de mon ravitaillement suivant, le phare semble toujours au même endroit et le feu de Tévennec toujours aussi loin.

Ma progression semble ralentie. Inquiet, j’interroge mes kayakistes en leur faisant remarquer que je semble faire du sur-place. Pour eux j’avance « petit à petit mais beaucoup moins que par rapport au départ ». Au bord du bateau, Pascal le pilote constate effectivement des courants contraires. Le temps se couvre par le sud-ouest, la mer est hachée et dans les faits les courants de marée sont neutralisés par les effets du clapot des vagues. Les courants au lieu d’être en notre faveur vont nous être contraires. Je nage maintenant à un peu moins de 2km/h. Nous prenons énormément de retard par rapport à nos prévisions et il nous sera impossible de nous aventurer dans le raz de Sein hors de la période d’étale. Je suis découragé, car en plus au loin sur ma gauche j’arrive malgré tout à distinguer le phare de la Vieille construit de 1882 à 1887 et qui sécurise fortement le passage du raz de Sein.

A environ 3km du feu de Tévennec, Alain annonce qu’il s’arrête. Pour ma part, je décide de continuer au moins jusqu’au feu. Tévennec est un élément emblématique du patrimoine des phares. Abandonné de tout gardiennage depuis 1910, la SNPB projette de faire appel au mécénat privé pour financer une maison d’artistes, après restauration progressive des lieux. La maison est ceinturée par une terrasse qui offre un point de vue exceptionnel à 360° sur le raz de Sein et l’Iroise. Les assauts du mauvais temps et les années d’absence d’entretien ont eu raison de l’état des lieux. Le toit fut d’ailleurs emporté par une tempête en 1910. À l’intérieur, les boiseries et les parquets sont en très mauvais état. Le défi est maintenant de relier les 2 phares les plus emblématiques pour la SNPB.

Après avoir parcouru 5km en plus de 2 heures, à 14h57, j’arrive enfin au pied de l’îlot. Je viens d’effectuer les 15km qui séparent les 2 phares en 5h11. Après avoir été balloté dans tous les sens par les vagues et avant de remonter sur le bateau qui doit nous ramener au port de Sainte Evette, je vais laisser aux poissons tout ce que j’ai pu absorber comme ravitaillements lors de cette traversée.

La journée n’en est pas finie pour autant car à 18h, il nous reste une dernière épreuve beaucoup plus agréable. Nous allons nous remettre à l’eau encadrés par les kayakistes du centre nautique de Plouhinec et nager dans le port d’Audierne pour être accueillis entre pluie et soleil par les applaudissements des participants de la Route de l’Amitié, des élus de la ville et de nos proches. La journée se terminera par un sympathique pot de l’amitié à la Mairie et une Fest Noz conviviale aux Capucins en fin de soirée.

Nous sommes satisfait et heureux car l’objectif qui consistait à alerter le public sur la situation d’Ar-Men et des autres phares en mer a bien été atteint.

Avis aux amateurs de défis aquatiques, comme le dit Marc Pointud : « Avec un peu d’imagination il y aurait plein de choses à faire ! » et le raid que nous venons de réaliser entre ces 2 phares les plus emblématiques en mer d’Iroise pourrait bien devenir un raid officiel organisé par la SNPB en France comme le sont la Manche ou Gibraltar. A suivre… Kenavo !!!!

PS : Un grand merci à notre amie Delphine qui nous a accueilli pendant ce séjours breton en famille 😉

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