Robben Island (en anglais) ou Robbeneiland (en afrikaans) est une île d’Afrique du Sud, située au large du Cap, dans la Table Bay (baie de la Table) à 7km à l’ouest de la côte de Bloubergstrand. L’« île aux Phoques » (Robben signifie en néerlandais ou afrikaans « phoques ») doit son nom aux nombreux mammifères observés en 1652 par les colons hollandais dans les eaux froides entourant l’île.
Le rôle de l’île dans le passé conflictuel de l’Afrique du Sud remonte aux débuts du colonialisme lorsque le premier colon néerlandais à gagner le Cap, Jan van Riebeeck, s’est querellé avec le chef local, Autshumato, qui lui servait d’interprète. Un malentendu culturel a entraîné le bannissement de ce dernier à Robben Island. L’île aux phoques était l’endroit parfait pour une prison, en raison des forts courants et des eaux froides mais l’interprète s’en évada sur une barque à l’aide d’un complice. A de très rares exceptions près, les tentatives d’évasion de Robben Island ont toutes échoué et la plupart des évadés se sont noyés durant la longue nage jusqu’à la côte.
De nos jours Robben Island est devenue un symbole mondial des droits de l’Homme, après avoir été utilisée comme prison, léproserie, hôpital psychiatrique et poste militaire de défense. Au 20ème siècle, les opposants noirs au régime de l’Apartheid, condamnés à de longues peines, y furent internés dont notamment trois futurs présidents sud-africains (Nelson Mandela, Kgalema Motlanthe et Jacob Zuma)
Aujourd’hui la prison a cédé la place aux touristes et cet ancien site de détention est devenu un véritable challenge pour les nageurs en eau libre. Cette année, dans le cadre des célébrations des 20 ans de la Démocratie en Afrique du Sud, l’épreuve annuelle d’eau libre, la Freedom Swim, s’est déroulée le samedi 3 mai 2014, avec comme parcours Robben Island jusqu’à Big Bay, Blouberg près du Cap.
C’est dans une eau à 12-13°C et sur une distance d’environ 7,5km au milieu des courants que les nageurs ont participé dans les différentes catégories proposées par les organisateurs : nageurs solo en maillot (25 nageurs), nageurs solo en combinaison (14 nageurs), nageurs en relais en maillot et nageurs en relais en combinaison. Dans le cadre de mon challenge des 7 îles-prisons à la nage, c’est dans la catégorie des nageurs en maillot que je me suis inscrit !!!
J’ai rendez-vous le samedi matin entre 7h30 et 8h au Nelson Mandela Gateway, située sur le Waterfront de Cape-Town. Ce quartier portuaire a été transformé en zone de restaurants et de magasins. Sur le chemin qui me mène de l’hôtel au lieu de rendez-vous, je passe devant de nombreuses devantures d’organismes touristiques qui proposent des excursions pour aller à la rencontre des grands requins blancs avec de grandes photos de squales toutes dents dehors ! Voilà de quoi mettre un peu plus de pression et de stress avant la traversée !!!
J’arrive sur le lieu de rendez-vous où je suis accueilli par les organisateurs pour le marquage et le docteur (ici en rouge) pour un contrôle médical. Il prend mes pulsations et la température (37.3°C) avant de me donner le feu vert pour participer.
Aux environs de 9h, nous embarquons sur une des navettes rapides, toutes baptisées selon les patronymes de prisonniers politiques embastillés au fil de l’histoire, qui doit nous conduire à la prison de Robben Island. Dans le port, un phoque nage aux abords du bateau ce qui confirme que l’eau n’est pas très chaude. La traversée en bateau s’effectue sous un épais brouillard avec une mer très calme, un peu ambiance des « Dents de la Mer » !!! Mais rassurez-vous, aucun requin blanc n’a été signalé dans cette zone, dixit les organisateurs.
Lorsque nous arrivons dans le port de l’île aux phoques, le brouillard s’est dissipé et laisse entrevoir quelques vestiges sinistres témoins, depuis le 17ème siècle, de ce paysage insulaire. Robben Island et sa prison symbolisent le triomphe de la liberté et de la démocratie sur l’oppression. Tout y est emprunt d’émotion.
C’est dans ce port que je vais me préparer et m’enduire de graisse. Muni du maillot de bain spécialement dessiné pour moi par Aquadeus et du bonnet fourni par l’organisateur, c’est vers 11h30 que je vais prendre le départ de la traversée avec les autres nageurs. Lorsque je me jette à l’eau, je suis saisi par la température de l’eau qui dépasse légèrement les 13°C. Je me dirige vers la sortie du port où un phoque se dore au soleil. Une fois sorti du port, je rejoins le bateau qui va m’accompagner tout au long de la traversée de la Table Bay (la baie de la Table du nom de la montagne de la Table qui surplombe Cape Town).
A bord de la petite embarcation pneumatique, il y a Chris et Shaun qui auront pour rôle de s’occuper de ma sécurité, de m’orienter et de me ravitailler… C’est la première fois qu ils font cela ! Quelques minutes à peine après les avoir rejoint, un animal passe en dessous de moi à toute vitesse, j’ai bien l’impression qu’il s’agit d’un dauphin. Le moment est à la fois flippant et magique et Shaun me confirme alors qu’il s’agit d’un dauphin. J’espère avoir l’occasion de le revoir mais cela ne sera plus le cas. Je continue de nager dans cette eau saumâtre et admire le magnifique paysage qui m’est offert lorsque je respire du côté droit.
J’ai une magnifique vue de la Table Mountain (Montagne de la Table) nom qui provient de sa forme sommitale. Elle culmine à 1086 mètres d’altitude et sa superficie au sommet est de 3km2. Elle est encadrée de part et d’autre de 2 collines Lion’s Head et Devil’s Peak qui laissent penser à 2 endroits pour s’asseoir autour de la table… je ne me lasse pas d’admirer ce magnifique paysage qui vient récemment d’être élu parmi les 7 nouvelles merveilles de la nature au monde.
Je continue à nager tout en essayant de scruter les fonds marins et dans l’attente d’une éventuelle surprise. Après une heure de nage, par l’effet certainement des courants, l’eau se rafraîchit considérablement et affiche les 12°C. Juste un petit degré de différence, mais c’est énorme lorsque l’on nage. Alors que je ne ressentais pas le froid jusque-là, cette différence de température va m’y faire penser jusqu’à la fin. J’espère à ce moment là ne pas finir en hypothermie.
Je distingue de mieux en mieux la côte où je dois arriver, mes accompagnateurs me font des signes pour m’orienter vers l’arrivée. A trop les regarder, je ne fais plus attention à ce qu’il y a dans l’eau quand soudain je reçois comme une décharge à l’épaule. Je viens de croiser une méduse. Cela me pique mais la douleur n’est pas forte, j’espère ne pas avoir à en croiser de nouveau. Je suis à 300m de l’arrivée lorsque mon bateau d’accompagnement me quitte pour laisser la place aux sauveteurs de Big Bay. Ceux-ci vont m’accompagner au milieu des vagues avec leur planche de sauvetage jusqu’à l’arche d arrivée.
Je suis au coude à coude avec un autre nageur et j’effectue mes derniers mètres en courant sur la plage afin de franchir la ligne d’arrivée. Je viens de terminer la 4éme traversée de mon challenge des 7 Îles-prisons au continent à la nage dans un temps de 2h02’57’’. Dès que j’ai franchi le portique d’arrivée, on me remet une médaille, une serviette et un bonnet en laine puis je suis pris en charge par un sauveteur qui va m’accompagner dans un local transformé en hôpital de fortune.
C’est un passage obligé pour tous les compétiteurs. Un médecin prend mes pulsations et la température : 34,5°C. Je suis obligé de rester tant que ma température n’est pas remontée au dessus de 35°C. J’en profite pour me changer et boire quelques boissons chaudes avec les autres nageurs. Après une vingtaine de minutes, je retourne voir le médecin qui m’annonce 36,3°C. Je peux donc quitter les lieux et rejoindre mon épouse sur la plage pour assister à la fin de la course.