Le premier Français à tenter la traversée de la Manche

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Le premier français à tenter officiellement la traversée de la Manche est le célèbre nageur Georges Paulus, vainqueur de la traversée de Paris 1905 et des 6 heures en 1907. Il a l’intention de faire la traversée le mercredi 12 août 1908 et compte partir aux alentours de trois heures. Ce jour là c’est la pleine lune et les courants sont au plus fort. Il compte sur eux pour mener à bien sa tentative. Dès qu’il s’agit d’organiser et de promouvoir la natation de marathon, le Journal « L’Auto » est toujours présent. Ainsi le journal et son rédacteur L. Manaud prennent toutes les dispositions et prêtent un puissant concours pour que Paulus ait le plus de chance de réussir.

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Ils vont tout mettre en œuvre pour que l’organisation soit irréprochable. Le bateau vapeur convoyeur affrété par le journal porte le nom « Pole Star ». Le commandant de l’expédition est confié à Mr Paul Rivet, un vieux loup de mer. Son parcours est remarquable, dès l’âge de huit ans il a commencé à naviguer. Puis il a participé aux guerres de Crimée et d’Italie. Il a ensuite navigué comme patron de pêche et enfin ce qui est remarquable a effectué au cours de ses campagnes plus de 70 sauvetage (Cf La Presse 10/08/08) Il connaît tous les coins et recoins, les passages difficiles et les courants de la Manche. Il est celui qui doit guider au mieux Paulus vers la France. Toute la presse française et britannique est conviée par L Manaud à assister à la tentative. Il y aura de nombreux correspondants français avec « La Presse », « Le Matin » et « le Petit Calaisien » et le photographe Simons. Du côté britannique il y aura les correspondant des « Sporting Life”, “Daily mail”, “Sub-Editor”, “Dover Standart”… (Cf La Presse 13/08/08) Le médecin de la préfecture de la Seine, Paul Gardé, est le docteur officiel. Pour l’accompagner, il y a sa plus fervente supportrice, son épouse mais également quelques « sportsmen » qui ont contribué à la réalisation de la traversée, comme Mrs Riffaud, Dubonnet et Ouvrier.

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Paulus s’est entraîné très sérieusement toute l’année pour essayer de franchir la fameuse nappe d’eau qui sépare la France de l’Angleterre. Une semaine avant, il se rend à Calais pour profiter des derniers jours qui lui restent avant sa tentative, afin de parfaire son entraînement en pleine mer et régler les derniers détails. (Cf La Presse 10/08/08)  Paulus est très confiant et a effectué sa dernière sortie en mer le lundi après midi. Mr Stauber, un des plus réputé pilote de Douvres, il est le fils du pilote qui accompagna le fameux capitaine Webb dans la légendaire traversée, a assisté à cet entrainement et a déclaré : « Paulus est le nageur le plus rapide que j’ai vu ici jusqu’à ce jour » (Cf La Presse 13/08/08)

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La veille Paulus dine en compagnie de tout ceux qui participent à l’expédition et il explique aux journalistes présent comment il s’est préparé depuis le début de l’année pour tenter de renouveler l’exploit de Webb. Il a établi son tableau de marche sur une moyenne de 3km200 à l’heure, ce qui est une vitesse rapide pour les nageurs de l’époque. A dix heures du soir, Paulus part se coucher pendant que les accompagnateurs terminent les préparatifs.

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Le mercredi 12 août 1908, après quelques minutes de repos, à une heure du matin, tout le monde est debout. Paulus est tout heureux et prêt à réussir. A une heure trente, tout le monde quitte l’hôtel des Cygnes pour se diriger vers la grande jetée. Là, amarré dans le port, le bateau vapeur « Le pole star » les attends. A bord, Paulus fait ses derniers préparatifs. Il en profite pour se faire enduire le corps d’une graisse spéciale qui doit lui permettre de résister au froid. A deux heures du matin, tout le monde est prêt. Quelques minutes plus tard, à 2h27, Paulus se jette à l’eau du haut de la grande jetée des « bateaux poste » à Douvres. La tentative vient de commencer, Paulus nage à belle allure. C’est la pleine lune, le temps est clair et la mer calme. (cf la Presse 13/08/08). Il est très bien dirigé par le pilote Ouvrier. A 2h50 Paulus est à 4km500 du départ. Il avance à 10 km/h environ, avec la force des courants. Mais de minutes en minutes cette mer calme commence à devenir mauvaise. Elle ne gêne en rien la progression du nageur qui paraît à l’aise. Soudain, c’est l’affolement ! Au milieu de cette mer houleuse les accompagnateurs du bateau perdent de vue le nageur. Gros moment d’angoisse à bord, Mme Paulus l’appelle en criant. La tête de Paulus apparaît sur la cime des vagues et leur répond tranquillement : « Ne vous inquiétez pas de moi, je ne vous perd pas de vue, tout va bien » (Cf La Presse 14 août 1908) Gros soulagement à bord. A 3h30 Paulus approche du Varne, véritable colline de sable sur de la roche au un tiers de la Manche. Là les courants sont plus forts car il y a beaucoup moins de profondeur. 

A ce moment il vient de parcourir 8km. Paulus ne montre aucun signe de fatigue. La mer est maintenant très mauvaise et le bateau à vapeur est très secoué. A l’intérieur, cela devient l’apocalypse, la plupart des passagers sont pâles puis verts. Ils ont du mal à se tenir à tout ce qu’ils trouvent, mât, bastingage, cordage, filets de pêche… Certains offrant aux poissons le dîner de la veille. A 4h27 Paulus a parcouru 14km500, à bord, seul le docteur Gardé et Mme Paulus sont légèrement indisposés. Tout le monde à bord est malade et incapable de s’occuper du nageur. Lui, de son côté, continue de nager comme si de rien était. A 5h27 Paulus a parcouru 17km. Seule son épouse continue de l’encourager. Elle essai péniblement de le ravitailler avec du chocolat chaud. Le bateau à l’air d’un vrai champ de bataille avec tous les corps allongés et malades. A 6h17 Après avoir absorbé trop d’eau de mer, Paulus se plaint de fortes coliques et de vomissement. Les larmes aux yeux et peu fatigué, il abandonne, après avoir parcouru 11 miles marin soit exactement 20km372 en 3h50’. A 11h le « Pole Star » arrive à Calais, une dizaine d’accompagnateurs en ressortent complètement défaits. Seul Paulus, son épouse et le docteur Gardé sont plus d’aplomb.

De l’avis des journalistes anglais qui ont suivi la tentative, ils estiment, de par leur expérience, que Paulus est l’homme certainement le plus qualifié pour renouveler l’exploit et de rajouter : « Burgess et Holbein n’auraient peut être pu tenir trois miles par une mer aussi mauvaise ; il est courageux votre homme ! ». (Cf la Presse 14/08/08) Mais Paulus, déçu, annonce clairement : « qu’il renonçait à jamais à tenter la fameuse traversée » (Cf La Presse 13/08/08) Encore une fois la traversée vient d’échouer.

Mais son choix de partir un jour de forte marée était-il judicieux ? Ne valait-il pas mieux attendre un moment plus propice et des conditions climatiques plus clémentes ?

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